Agora 32

Sous les bombardements et entre les campements de réfugiés, le Free Gaza Circus Center s’efforce tous les jours de réenchanter la vie des enfants palestiniens : "Nous continuons notre travail dans le domaine du soutien psychologique pendant la guerre. Celui qui entretient le sourire et le bonheur aide nos enfants à garder leurs visages heureux."

Au milieu de la guerre, le centre du cirque gratuit de Gaza offre un sentiment de liberté éphémère

Mohammed Ayman, co-fondateur du Free Gaza Circus, est déterminé à divertir les enfants de Gaza
extrait d’un article de Vineetha Mokkil

Mon ami Yusef Khader et moi, tous deux nés et élevés à Gaza, avons lancé le Free Gaza Circus en 2018. Nous avons également ouvert une école dans le nord de Gaza pour former les jeunes, appelée Free Gaza Circus Center. La culture du cirque est pratiquement inexistante à Gaza. Les jeunes de Gaza regardaient des spectacles de cirque sur les réseaux sociaux. Nous savions qu’ils appréciaient ça. Alors nous avons pensé : pourquoi ne pas avoir un groupe de cirque dans notre pays ? Nous avons lancé le Free Gaza Circus pour donner aux jeunes et aux étudiants palestiniens une chance d’entreprendre quelque chose de nouveau, de mieux se connecter avec la communauté et leurs coéquipiers, et d’éprouver un sentiment de libération en se produisant dans le cirque. Les gens – en particulier les jeunes au chômage – doivent endurer de nombreuses difficultés à Gaza. La vie quotidienne est un combat pour la plupart des habitants de Gaza. Nous avons créé le Cirque parce que nous voulions donner aux jeunes une chance de se sentir libres. C’est un endroit où les jeunes peuvent se libérer et s’exprimer librement à travers leur corps.

Avant la guerre, nous étions au nord de Gaza. Nous avons eu 180 élèves pendant l’année scolaire. Pendant les vacances d’été, il y avait plus de 2 000 étudiants au Centre. Ils étaient de tous âges, de dix ans à adolescents, tous très enthousiastes à l’idée d’apprendre et de jouer.

Nous étions comme une grande famille. Nous avons beaucoup ri même dans les moments difficiles. Quand la guerre a commencé, nous avons dû évacuer vers le sud. Notre groupe s’est dispersé. Nous avons perdu la trace de nos étudiants. Quelques-uns d’entre nous se sont retrouvés au camp de Jabalia et se sont regroupés. Nous avons entendu dire que le Centre avait été gravement endommagé lors d’une attaque israélienne, mais comment pouvons-nous y retourner et vérifier !

Désormais, nous divertissons les enfants (et les adultes) au camp. J’aime quand les visages des enfants s’illuminent. Lorsque nous jouons pour eux, nous espérons que cela leur fera oublier la violence horrible qu’ils ont vue et subie. Oublier les bombardements et les maisons détruites. Oublier les larmes qu’ils ont versées. Cela les distrait de ce qui se passe et leur donne un sentiment de sécurité. Nous leur donnons un sentiment de liberté pendant au moins quelques minutes. Ce n’est peut-être qu’un sentiment, ce n’est peut-être pas réel, mais nous sommes heureux de les divertir alors que la guerre fait rage.

Nous les encourageons également à faire des activités de mouvement avec nous. Cela aide à libérer la peur et l’énergie négative qu’ils ont emmagasinées à cause de la guerre.

Nous rassemblons des sportifs alors que nous passons de camp en camp. Notre groupe s’agrandit donc ces jours-ci. Nous avons joué dans de nombreuses écoles de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies où vivent aujourd’hui des Palestiniens déplacés. Nous continuerons à le faire aussi longtemps que nous serons ici. La guerre ne peut pas nous arrêter.

Photos : Free Gaza Circus Center